Pour rappel, voici les propos de François Ozon cités
dans le Figaro :
«Cela ne veut pas dire
qu'elles le font, mais le fait d'être payé pour avoir des relations sexuelles
est quelque chose de très évident dans la sexualité féminine (...) C'est le cas
parce que la sexualité est complexe. Je pense que vouloir être un objet sexuel,
être désiré, être utilisé, est quelque chose de très courant. Il y a un genre
de passivité que les femmes recherchent. (...) C'est la réalité."
Je passerai outre
l'ineptie de considérer la sexualité féminine comme passive. Je mettrais cette
imbécilité sur le compte de l'ignorance. La question du fantasme de
prostitution est intéressante en revanche. Pour moi fantasmer sur une situation
de prostitution est un non-sens. Je m'explique.
Dès qu'un rapport sexuel est monnayé, il est
contraint. Même si le client est beau et qu'il sent bon, même si le ou la
prostitué-e n’est pas dans une inextricable misère, le simple fait qu’il y ait
une contre-partie matérielle infléchit le désir et l’influence. Le désir n’est
plus la seule force qui pousse un épiderme à se frotter à un autre. Dans une
société où chacun-e est libre de disposer de son corps, c’est le désir et lui
seul qui doit être à l’origine d’une fusion des sueurs. Or dans le cas de figure
de la prostitution, l’argent entre dans l’équation. Les euros sont présents
dans un coin de la tête, alors que l’esprit devrait être tout entier dans les
corps, l’envie et le plaisir.
Une personne prostituée est toujours dans une
situation de contrainte, même dans les cas (minoritaires, rappelons-le) où elle
accepte sa situation. J’ai accepté mon activité de traductrice de bon coeur, et
pourtant le fait d’être rémunérée implique que je traduise des textes
improbables qui parlent de torches olympiques.
A partir de là, fantasmer sur une
situation de contrainte est un non sens. Ce qui est créé par l'imaginaire est
forcément conforme à ses propres désirs – même des désirs étranges ou
difficiles à assumer, comme faire l’amour avec une personne a priori détestable
selon des critères rationnels. Ce sera tout de même un désir, et non une
contrainte, qui est toujours une réalité qui s'impose de l'extérieur. Donc les
fantasmes de prostitution, viol, coups sur la gueule, etc sont plutôt des
désirs de mises en scènes qui ressemblent à de la prostitution etc, mais qui
n’en sont pas réellement.
Dans le cas du « fantasme de
viol », c’est encore plus net. Un fantasme implique un état d’excitation
ou du moins de disponibilité érotique. Fantasmer, c’est créer, choisir, arrêter
et recommencer à sa guise, c’est être actif. Il est donc impossible de
fantasmer sur une situation de contrainte, les termes mêmes se contredisent.
D’ailleurs, puisque notre
imaginaire est capable d’autant de fantasmes, de jeux, de subversions, puisque
notre imaginaire est si actif.. les femmes sont-elles si passives que François
Ozon voudrait nous le faire croire ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire