mercredi 22 mai 2013

Fantasme de prostitution ? aux limites de la logique



Pour rappel, voici les propos de François Ozon cités dans le Figaro :
«Cela ne veut pas dire qu'elles le font, mais le fait d'être payé pour avoir des relations sexuelles est quelque chose de très évident dans la sexualité féminine (...) C'est le cas parce que la sexualité est complexe. Je pense que vouloir être un objet sexuel, être désiré, être utilisé, est quelque chose de très courant. Il y a un genre de passivité que les femmes recherchent. (...) C'est la réalité."

Je passerai outre l'ineptie de considérer la sexualité féminine comme passive. Je mettrais cette imbécilité sur le compte de l'ignorance. La question du fantasme de prostitution est intéressante en revanche. Pour moi fantasmer sur une situation de prostitution est un non-sens. Je m'explique. 

Dès qu'un rapport sexuel est monnayé, il est contraint. Même si le client est beau et qu'il sent bon, même si le ou la prostitué-e n’est pas dans une inextricable misère, le simple fait qu’il y ait une contre-partie matérielle infléchit le désir et l’influence. Le désir n’est plus la seule force qui pousse un épiderme à se frotter à un autre. Dans une société où chacun-e est libre de disposer de son corps, c’est le désir et lui seul qui doit être à l’origine d’une fusion des sueurs. Or dans le cas de figure de la prostitution, l’argent entre dans l’équation. Les euros sont présents dans un coin de la tête, alors que l’esprit devrait être tout entier dans les corps, l’envie et le plaisir.

Une personne prostituée est toujours dans une situation de contrainte, même dans les cas (minoritaires, rappelons-le) où elle accepte sa situation. J’ai accepté mon activité de traductrice de bon coeur, et pourtant le fait d’être rémunérée implique que je traduise des textes improbables qui parlent de torches olympiques.

A partir de là, fantasmer sur une situation de contrainte est un non sens. Ce qui est créé par l'imaginaire est forcément conforme à ses propres désirs – même des désirs étranges ou difficiles à assumer, comme faire l’amour avec une personne a priori détestable selon des critères rationnels. Ce sera tout de même un désir, et non une contrainte, qui est toujours une réalité qui s'impose de l'extérieur. Donc les fantasmes de prostitution, viol, coups sur la gueule, etc sont plutôt des désirs de mises en scènes qui ressemblent à de la prostitution etc, mais qui n’en sont pas réellement.

Dans le cas du « fantasme de viol », c’est encore plus net. Un fantasme implique un état d’excitation ou du moins de disponibilité érotique. Fantasmer, c’est créer, choisir, arrêter et recommencer à sa guise, c’est être actif. Il est donc impossible de fantasmer sur une situation de contrainte, les termes mêmes se contredisent.

D’ailleurs, puisque notre imaginaire est capable d’autant de fantasmes, de jeux, de subversions, puisque notre imaginaire est si actif.. les femmes sont-elles si passives que François Ozon voudrait nous le faire croire ?

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